Le média South China Morning Post a dévoilé la semaine dernière un rapport sur les tendances 2021 qui façonnent le numérique en Chine. Le DEFI vous en propose un condensé dans son e-DEFI hebdomadaire.
Après une période de croissance rapide et d’innovation, le secteur d’Internet en Chine est entré dans une nouvelle phase de développement avec un durcissement de la réglementation, un marché intérieur de plus en plus saturé et en pleine évolution démographique, ainsi que des tensions géopolitiques. Ces tendances incitent les entreprises à se projeter en dehors de leurs marchés établis, à revoir leurs business models et à se tourner vers de nouvelles cibles afin de rester compétitives et de trouver de nouvelles opportunités de financement.
Quelques chiffres Chine/USA:
- Nombres d’utilisateurs d’Internet : 989 millions (+85 millions entre 2020 et 2021) en Chine contre 310 millions aux Etats-Unis (+12 millions entre 2020 et 2021).
- Levées de fonds : le nombre de levées de fonds de startups a diminué de 11% en 2020. Les Etats-Unis ont mieux résisté à la pandémie en termes de nombre d’opérations.
- Investissements des géants de la tech (Tencent, Xiaomi, Alibaba Group, etc.) : Tencent a consolidé son leadership tandis que la plupart des autres géants se sont retirés de leurs investissements. Les nouveaux arrivants, comme ByteDance et Meituan, sont devenus plus actifs. Aux États-Unis, le nombre d’investissements des géants de la tech a atteint un niveau historique, Google et Microsoft en tête.
- Introductions en bourse : les entreprises technologiques chinoises ont levé un total de 46 milliards de dollars depuis janvier 2020. L’introduction en bourse la plus importante a été celle de Kuaishou (application mobile de partage de vidéos), qui a levé 6,2 milliards de dollars en février 2021. La plus importante introduction en bourse de sociétés technologiques américaines au cours de la même période se serait classée au cinquième rang par rapport à ses homologues chinoises.
Les tendances principales :
- Un durcissement de la réglementation dans divers domaines :
- Des nouvelles règles antitrust pour lutter contre les comportements monopolistiques des géants de la tech.
- Un contrôle renforcé du secteur fintech dont la facilité à octroyer des prêts inquiète le gouvernement.
- Une accélération de la réglementation en faveur de la protection des données avec l’adoption de la Data Security Law. Une autre loi « The Personal Information Protection Law » doit également voir le jour cette année.
- Une surveillance des cryptomonnaies : alors que la création et la négociation de cryptomonnaies sont illégales en Chine depuis 2017, la Chine renforce la surveillance du minage de Bitcoins. Cette pression serait notamment liée à l’ambition de la Chine d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2060, le minage de Bitcoins consommant beaucoup d’énergie.
- Un chemin semé d’embûches pour les IPO chinoises
- Si les Etats-Unis restent un lieu privilégié d’introductions en bourse en raison des règles souples qu’ils offrent et du fait qu’ils permettent de contourner les restrictions de la Chine sur les investissements étrangers, les récents retraits forcés couplés à une surveillance accrue de la part des autorités chinoises renforcent l’incertitude des entreprises. De nouvelles mesures obligent notamment les plateformes exploitant un grand nombre de données à se soumettre à un examen de leur cybersécurité si elles prévoient de s’introduire en bourse à l’étranger.
- Des projets d’expansion à l’étranger qui subissent les conséquences des tensions diplomatiques
- En 2020, les États-Unis et l’Inde (entre autres) ont lancé des enquêtes sur certaines entreprises chinoises et ont parfois cherché à en provoquer la fermeture sur leur territoire.
- Les entreprises de la tech chinoises éprouvent un regain d’intérêt pour des marchés comme l’Asie du Sud-Est qui connaît une forte croissance du PIB et de la pénétration d’Internet. Singapour devient un lieu privilégié pour l’implantation de sièges régionaux.
- Une nouvelle génération de startups de l’e-commerce se développe en minimisant ses origines chinoises afin d’éviter les sentiments anti-chinois ou encore d’être associée au stéréotype de mauvaise qualité des produits « Made in China ». Dans le secteur de la mode, Shein, Cider, Urbanic et Zaful ont toutes connu une forte croissance sur les marchés étrangers en minimisant leurs origines chinoises, en profitant de chaînes d’approvisionnement nationales solides et en s’appuyant sur le marketing digital. Une de leurs caractéristiques est aussi de gérer des sites e-commerce indépendants plutôt que de vendre sur des marketplaces. Cela leur offre un accès précieux à une grande quantité de données qui leur permet de répondre de façon plus précise à une demande en constante évolution.
- Une évolution démographique qui met en évidence des segments d’utilisateurs sous-exploités :
- L’augmentation du nombre d’internautes âgés en Chine favorise l’expansion de la « silver economy ». Fin 2020, 11 % des utilisateurs d’internet en Chine étaient âgés de 60 ans ou plus, contre seulement 4 % en 2016. Le taux de pénétration d’Internet chez les séniors étant encore relativement faible, ce groupe d’utilisateurs représente un grand potentiel. Le ministère de l’Industrie et des Technologies de l’information (MIIT) chinois a même publié des directives en avril 2021 pour que les pages web et les applications mobiles effectuent des « modifications adaptées aux personnes âgées ».
- La « sheconomy » émerge portée par l’augmentation du niveau d’études des femmes, leur présence renforcée sur le marché du travail, la baisse du taux de natalité et une recherche d’égalité entre les sexes.
- Les villes de 3e rang et de rangs inférieurs ainsi que les zones rurales voient leur taux de pénétration d’Internet augmenter. Les secteurs des services financiers, de la productivité du travail, du covoiturage et du e-commerce y connaissent une croissance rapide.
- Un intérêt pour les canaux de communication directs avec les consommateurs. Le pic du taux de pénétration d’Internet se traduit par une ralentissement de la croissance des ventes et par une hausse des frais marketing facturés par les plateformes e-commerce. Les domaines privés se présentent comme une solution pour créer de l’engagement de façon directe avec les consommateurs. WeChat représente la plus grande source de trafic sur des domaines privés, grâce à sa grande base d’utilisateurs et à son écosystème complet, qui englobe des fonctions de messagerie, d’e-commerce et de paiement.
Pour lire le rapport, cliquez ici : China Internet Report 2021.