La semaine dernière se tenait une matinée de conférences sur le secteur de la mode organisée par Kantar Worldpanel à la Fédération de la Maille, de la Lingerie & du Balnéaire. Le DEFI vous en partage des informations stratégiques et des pistes de réflexion pour faire face aux aléas et à la déconsommation en 2024. Yohann Petiot, Directeur Général de l’Alliance du Commerce, était présent pour apporter son témoignage.
La rétrospective du marché de la mode en 2023
L’année 2023 a été marquée par une série d’événements dans le secteur de la mode, reflétant un contexte économique tendu et des changements de comportement significatifs.
- Le marché a été secoué par une vague de défaillances d’enseignes tout au long de l’année, avec une augmentation alarmante de 51% par rapport à l’année précédente (source Altares).
- L’arrivée de nouveaux concurrents, notamment l’entrée de TEMU sur le marché en avril 2023, a ajouté une dimension supplémentaire à la compétition déjà intense dans le secteur.
- L’automne 2023 a été marqué par un record de chaleur, ce qui a conduit à des changements de comportement des consommateurs.
- Le bonus réparation a été lancé en novembre 2023.
- Au niveau européen, une tendance à la déconsommation s’est manifestée. En ce qui concerne les vêtements, les chaussures et les accessoires, une baisse de 4,1% en volume par rapport à 2022 et de 12,8% par rapport à 2019 a été enregistrée. Seuls les Espagnols ont montré une dynamique d’achat positive cette année.
- La tendance à la concentration sur certains marchés s’est également accentuée, avec les 20 principaux acteurs représentant 51% des achats de prêt-à-porter femme en France et 58% pour le prêt-à-porter homme en 2023.
Alors que nous entrons dans l’année 2024, des mouvements majeurs sont prévus, notamment avec les Jeux Olympiques, des expérimentations d’uniformes à la rentrée scolaire et une proposition de loi contre la fast fashion.
Les trois pistes de réflexion pour l’année 2024
Adapter votre offre aux changements de comportements
- Enjeu 1 : Désaisonnaliser.
Les démarrages de saison sont de plus en plus tardifs. Par exemple, en janvier, la part de trafic pour les vêtements pour femmes était de 19,4% en 2022, contre 26,4% en 2014. De plus, la désaisonnalisation se couple à la dérégionalisation : il s’agit adapter les mises en avant de produits selon le lieu d’implantation. La seconde main peur venir combler les creux d’achat pour les marques.
- Enjeu 2 : Piloter plus finement la promotion.
Depuis la pandémie, la sensibilité aux prix réduits a augmenté. Désormais, 73% des acheteurs de vêtements pour adultes choisissent des magasins offrant les meilleures réductions ou promotions, ce qui représente une augmentation de 10% depuis 2021. En outre, 20% des Français sont « promodépendants », achetant plus de 85% de leurs vêtements à prix réduits. Ce sont des personnes plus opportunistes que des personnes dans le besoin, selon Kantar. Les marques doivent essayer de réinventer les promotions. Des approches telles que le parrainage, les soldes libres (le consommateur choisit la réduction à appliquer), la récompense des comportements responsables et la négociation (notamment dans le domaine de la seconde main) peuvent être envisagées.
- Enjeu 3 : Récompenser la fidélité.
- Enjeu 4 : S’ouvrir aux soldeurs/destockeurs qui est le 3ème lieu d’achat de mode.
Continuer de tirer profit du digital
- Enjeu 1 : Maintenir le cap des investissements.
Les entreprises uniquement digitale, appelées « pure players », détiennent une part de marché en volume de 65%. L’évolution de la part de marché entre 2022 et 2023 est de 4,5%. Les entreprises de modèle « click and mortar », qui sont des entreprises physiques ayant développé une activité en ligne, représentent une part de marché en volume de 35%. L’évolution de la part de marché entre 2022 et 2023 est de 5,4%.
- Enjeu 2 : Les réseaux sociaux.
Pour 3/4 des Français, les réseaux sociaux sont devenus une routine. Le marketing d’influence représente une opportunité majeure, avec 13% de la population suivant des influenceurs (personnalités publiques ou créateurs de contenu). Chez les moins de 25 ans, ce chiffre monte à 45%. Cela offre un taux de conversion intéressant. Les articles de cosmétiques et de mode sont les catégories les plus promues par les influenceurs.
Anticiper des changements de styles de vie
- Enjeu 1 : Se préparer à un choc démographique (population vieillissante, baisse du nombre de naissances).
Et si les relais de croissance se trouvaient aussi chez les seniors ? Ce groupe démographique a été celui qui a le moins sacrifié le marché ces dernières années. La contribution à la réduction de la consommation en volume entre 2019 et 2023 se répartit comme cela : 30% pour les 35 à 49 ans, 28% pour les 25 à 34 ans, 22% pour les 50 à 64 ans, 11% pour les moins de 25 ans et 8% pour les 65 ans et plus.
- Enjeu 2 : Approche des générations distincte (pouvoir d’achat et styles de vie différents).
Par exemple, les – de 25 ans représentent 13% des acheteurs, parmi lesquels 33% sont ont des revenus modestes et 31% achètent de la mode d’occasion. Leur motivation réside dans l’apparence, la socialisation et l’influence. Ils acquièrent en moyenne 35 articles par an, avec un budget de 665€. Quant aux + de 65 ans, ils constituent 24% des acheteurs, dont 19,1% sont aisés. Leur intérêt se porte vers la RSE et les soins personnels. Ils achètent en moyenne 40,5 articles par an, avec un budget de 636€.
- Enjeu 3 : Profiter des opportunités régionales.
Par exemple, l’indice de part de marché en volume des 25/34 ans est de 104 dans le nord mais seulement de 78 dans le Sud-Est de la France. Chaque région a ses propres tendances, préférences et comportements et les marques doivent s’y référer.
Pour conclure,
Afin de générer une croissance vertueuse, les marques doivent :
- Contourner les aléas : désaisonnaliser, démoyenniser, digitaliser.
- Inscrire la mode circulaire comme fil rouge à moyen terme.
- Faire savoir leurs actions et cibler les bonnes personnes.